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Article de presse

Vous retrouverez ci dessous les deux scans du journal.

Extrait 1
Extrait 2

Voici une retranscription de l’article de presse

Le Petit Méridional, 12 janvier 1929.

LES INVENTIONS REMARQUABLES D’UN MÉRIDIONAL

La transmission des images à distance est un problème désormais résolu. La chose est au point et l’on a pu lire bien des relations vantant les mérites de l’invention aujourd’hui, rendue pratique.

Mais on a, jusqu’ici, et délibérément laissé de côté le nom de l’inventeur. Car nous ne tenons point comme tel M. Edouard Belin, ingénieur, dont les mérites sont très considérables, mais qui, il faut bien le dire, n’a eu qu’à perfectionner un appareil connu désormais sous le nom de bélinographe.

Mais l’inventeur de l’appareil permettant aujourd’hui de transmettre couramment l’écriture, les dessins, les photos, par télégraphe ou par TSF, est un Méridional, ancien élève du lycée de Montpellier, le capitaine du génie François Fulcrand, retraité, depuis trois mois, dans sa ville natale, à Canet (Hérault).

Nul n’est prophète en son pays !

L’invention du capitaine Fulcrand est passée, en son temps inaperçue. Pas de tout le monde, et c’est pour cela sans doute que le bélinographe fonctionne aujourd’hui.

Pourtant en 1904, l’adjudant du génie Fulcrand – celui-là même qui en 1897 lança les premières ondes hertziennes en France, lors des expériences de TSF réalisées entre le Mont-Valérien et le fort de Bicêtre – réalisa un appareil de transmission de l’écriture et des dessins, sur lignes télégraphiques.

Les résultats furent à ce point satisfaisants que l’Administration militaire ordonna de mettre l’étude ce genre de transmission télégraphique.

L’inventeur François Fulcrand chercha tant et si bien qu’il parvint en 1907 à construire un appareil fonctionnant à la plus grande satisfaction.

Des expériences officielles concluantes furent faites entre le Mont Valérien et Versailles, en présence des généraux du génie du Gouvernement militaire de Paris.

L’écriture était à distance, fidèlement reproduite, les dessins retracés également. Et cela grâce à un système très simple au point de vue mécanique et électrique, fondé sur le principe de la synchronisation de deux mouvements aux points de départ et d’arrivée.

La dépêche autographe, écrite avec une encre isolante sur une feuille de papier métallisé, était enroulée sur un cylindre entraîné par un mouvement d’horlogerie. Un stylet parcourait en spirale la surface du papier métallisé, touchait de sa pointe le métal sur la trace de l’encre, interrompant à ce moment, le passage du courant électrique.

Sur l’appareil récepteur, le stylet était remplacé par un crayon qui reproduisait sur un cylindre revêtu de papier blanc les impressions reçues au départ par le stylet, au contact de la partie encrée.

La reproduction était obtenue par une série de points et de hachures très rapprochées, donnant, dans l’ensemble, le même dessin que l’original.

Cet appareil téléautographique, ainsi qu’il fut alors baptisé, fut honoré d’une modeste subvention et … d’un témoignage de satisfaction du ministre de la Guerre ! ! !

Comme il advient de toutes les inventions, des perfectionnements étaient nécessaires. Un Allemand, le professeur Korn, puis un français, Belin, les apportèrent à des appareils nouveaux, mais dans lesquels les principes utilisés par M. Fulcrand étaient bien entendu respectés.

Le système des deux cylindres tournant synchroniquement, l’utilisation du mouvement d’horlogerie, le papier métallisé, le stylet recevant les impulsions du courant redressé, rien ne manquait et ne manque aux appareils devenus, en ces derniers mois, d’un usage courant intéressant au plus au point les amateurs de TSF qui seront les premiers à bénéficier de la remarquable invention du capitaine Fulcrand, amélioré certes, mais transportée simplement du domaine de la télégraphie à celui de la radio par M. Édouard Belin.

Ainsi cette invention, que de nombreux laboratoires français et étrangers fouillent en cette année 1929, fut mise au jour en 1904 par un modeste militaire qui n’en conçut nul orgueil, n’en retira nul avancement, et nul profit…, sinon le témoignage ministériel de satisfaction ! Eau bénite de cour ! ! !

Pourtant le capitaine Fulcrand, qui a pris sa retraite philosophiquement dans la maison natale, là-bas sur les bords de l’Hérault, avait droit à ce titre, et à bien d’autres, à une reconnaissance plus complète. Car les services rendus par M. Fulcrand au pays sont nombreux.

Les citer tous nous entraînerait trop loin, mais il ne nous est pas permis à nous Méridionaux, d’ignorer que le capitaine Fulcrand fut l’un des artisans des premiers essais de la TSF avec antenne aux grandes manœuvres de 1901 à Béthinie.

En 1919, le capitaine Fulcrand inventa un procédé de projecteurs tournants pour nappes lumineuses et un modèle de phares pour terrains d’atterrissage, commandé par TSF du haut des avions en vol.

Et voilà pour le progrès pur.
Veut-on noter encore que le capitaine Fulcrand a mis ses hautes qualités scientifiques au service de l’art. On apprendra ainsi que lors des fêtes du cinquantenaire de la République, en 1920, et du transfert sous l’Arc de Triomphe du corps du Soldat inconnu, c’est encore notre compatriote qui avec le matériel de la défense contre avions réussit les remarquables embrasements des Tuileries, des Invalides, de Montmartre, de l’Arc de Triomphe et les inoubliables illuminations de tous les monuments de Paris.
Plusieurs centaines de projecteurs, cinq tonnes de matière éclairante avaient été nécessaires à la réalisation de cette vaste féerie lumineuse, aussi une fois de plus on avait vu, à Paris, que la lumière… vient du Midi !

C’est encore au capitaine Fulcrand que l’on doit la parfaite mise au point du procédé de fontaines lumineuses par projections, qui triompha si entièrement à l’Exposition des Arts décoratifs.

Pour la célérité des voyageurs en chemin de fer, M. Fulcrand inventa encore deux appareils, dont l’un notamment était destiné à répéter et à enregistrer sur la locomotive tous les signaux rencontrés sur la voie et, d’autre part, un dispositif permettant à un convoi de se couvrir et de se découvrir par ses propres moyens.

Présenté à la Compagnie du Nord, le projet demeura plusieurs mois en étude, puis il fut répondu que la Cie ne pouvait engager la dépense de cet appareillage.

L’année suivante, des appareils analogues étaient mis en service sur le réseau du Nord !…

Enfin, au point de vue de la défense nationale, et pendant son séjour au 2° génie à Montpellier, le capitaine Fulcrand mit au point divers dispositifs de mise de feu à distance, et de mines à retardement, dont les applications pratiques furent faites lors de la destruction de cheminées d’usines à Balaruc et à Narbonne, et d’un pont sur le Lez.

Une carrière aussi bien remplie, une vie si entièrement consacrée aux recherches génératrices de progrès méritaient d’être dévoilées à nos lecteurs. Nous redoutons, certes, d’avoir ce faisant offusqué la modestie de cet humble officier sans ambitions, mais riche de connaissances et travailleur inlassable. Vers sa retraite de Canet, où il n’a certes pas voulu demeurer inactif, Le Petit Méridional lui apportera une part de l’admiration de bien de nos concitoyens qui, comme nous, ne comprendront pas que tant d’utile activité soit demeurée sans récompense.

Blasé sur la reconnaissance officielle pour une œuvre accomplie dans l’intérêt national, le capitaine Fulcrand s’est aujourd’hui attaché à faire aboutir le projet, réclamé depuis1855, d’un canal d’irrigation de la plaine de Canet. Là, au moins, peut-il espérer la reconnaissance de ses concitoyens qui apprécieront, bientôt, son effort en vue de la réalisation de nombreuses améliorations agricoles.

Et dut-il n’en jamais recevoir d’autre, quelle plus douce fierté pourrait être la sienne que d’obtenir, un jour, la reconnaissance sincère de sa petite patrie ?

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